Être une terre d’accueil et de solidarité pour les migrants : ils sont des citoyens.
La Région Bretagne n’est pas dépositaire de la responsabilité sur les migrations. Néanmoins il est inconcevable que la Bretagne ne soit pas soucieuse de cet impératif de l’humanité qu’est la question migratoire que les contraintes préfectorales organisent à l’échelle de la région.
Le parallèle entre deux phénomènes –l’émigration des Bretons à l’étranger et l’immigration étrangère en Bretagne – vise à interroger une expérience régionale singulière: terre d’émigration devenue terre d’immigration, elle est potentiellement porteuse d’un autre regard sur les processus d’intégration des populations immigrées et sur leurs conditions d’accueil.
Le territoire breton, bien que caractérisé par une immigration peu massive et tardive au regard d’autres régions françaises, peut trouver intérêt à intégrer cette dimension comme composante de son identité et comme élément de son patrimoine économique, social, historique et culturel.
Il s’agit de provoquer des rencontres entre plusieurs acteurs (institutions, associations, chercheurs, documentaristes, etc.) et de stimuler ou de renforcer la recherche et les initiatives en tout genre sur cette question en Bretagne. Le dynamisme et la richesse de la vie culturelle, artistique, intellectuelle et associative en Bretagne peuvent être ainsi mis à profit de projets ayant trait aux questions d’immigration.
Qui sont les migrants ?
Venant d’Asie, du Caucase, du Moyen-Orient, d’Afrique de l’Est et de l’Ouest, ils diffèrent profondément de l’immigration voulue par nos gouvernants depuis un siècle qui est celle de travailleurs peu qualifiés rejoignant une classe ouvrière surexploitée. Ces migrations concernent aujourd’hui des femmes et des hommes, le plus souvent jeunes, urbanisés et possédant un métier, fuyant les guerres, les régimes dictatoriaux et les catastrophes climatiques occasionnées ou alimentées par les dominations économiques et les guerres civiles. Elles concernent également des populations de l’Union Européenne comme les Roms et plus généralement des migrants venant de l’Est.
Notre pays, depuis la première Déclaration des droits de l’homme de 1789 qui repose sur la libre circulation des personnes, a toujours été une terre de migration. Elle est fondatrice d’une citoyenneté solidaire de droits qui appelle une politique d’accueil et de libre installation, reprise dans l’article 13 de la déclaration universelle des droits humains de 1948.
Une double hypocrisie
Il y a une double hypocrisie de nos gouvernements nationaux et européens.
Ces derniers semblent découvrir la nécessité de réelles politiques d’accueil qui ne laissent pas les réfugiés subir des conditions indignes, illégales, illégitimes et odieuses, que sont les camps dans les villes et aux frontières, en rupture complète avec les droits fondamentaux et d’accueil de la Convention de Genève de 1951.
La loi en débat actuellement sur les demandeurs d’asile est l’expression d’une politique de plus en plus sélective et répressive. Elle aggrave un clivage destructeur et mortifère entre humains en mettant en place un tri entre « bons réfugiés » aux qualifications professionnelles exploitables et les « indésirables», réserve économique à géométrie variable selon les besoins du capitalisme. Elle va même jusqu’à remettre l’accueil des personnes malades aux bons soins du ministère de l’Intérieur.
La seule réponse des gouvernements à l’urgence repose sur le filtrage des réfugiés et la fermeture des frontières, avec ses murs et ses violences policières. Cela a de graves conséquences :
● des centaines de milliers de migrants sont en danger de mort sur les routes et les mers (3000 morts depuis le début de l’année),
● les passeurs s’enrichissent cyniquement,
● le programme Frontex sous-traite à des sociétés privées l’intervention des Etats en Méditerranée,
● une politique de rétention dans les pays de première arrivée,
● la gestion des populations migrantes à l’aide de quotas par pays (24 000 sur deux ans pour la France), quotas qui sont scandaleusement inadaptés aux 350 000 réfugié arrivés en Europe.
Liberté de circulation et d’installation !
Une autre politique d’accueil repose sur la liberté de circulation et d’installation pour tous les citoyens du monde, où qu’ils se trouvent. Notre pays et l’Europe ont les richesses pour les accueillir. Un réel partage des richesses est nécessaire entre tous ceux qui habitent et travaillent dans nos pays.
Elle rejoint en terme de droits « La Lettre ouverte au président de la République », signée par la plupart des organisations de défense des immigrés et quelques organisations syndicales (Syndicat de la magistrature et Solidaires).
Quelques revendications urgentes :
-Ouverture de centres d’accueil en dur tout au long de la trajectoire migratoire, qui apportent aux personnes une réponse à leurs besoins vitaux corporels et psychologiques et permettent d’exercer sereinement leurs droits, notamment de demander l’asile.
-La dénonciation d’une politique de tri dans des centres d’identification et d’enregistrement indignes par leur méthodes humaines et matérielles qui tendent à la privation de liberté et cette impossible distinction entre asile politique et exil économique qui clive dans l’extrême précarité pauvres et réfugiés, tous ayant risqué leur vie pour arriver en Europe. Cette distinction est une attaque contre les droits humains fondamentaux.
-La suspension générale de l’application du règlement Dublin sur l’ensemble de l’Europe (ce qui remet en cause l’espace dit de Schengen) et les accords entre la France et le Royaume-Uni qui ont créé l’enfer depuis deux ans à Calais.
-L’urgence d’ouvrir des « voies d’accès légales et sûres pour les personnes qui se trouvent dans des pays tiers [...] qui souhaiteraient venir en Europe sans risquer leur vie et sans recours à des passeurs », donc à une sécurisation des parcours par l’octroi (prévu déjà dans les textes européens) d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées.
-Une aide au développement qui ne repose pas sur l’externalisation des contrôles migratoires.
Pour une solidarité citoyenne
C’est donc à une solidarité citoyenne que nous appelons pour mettre en œuvre chaque point de la déclaration et faire respecter les droits fondamentaux qui sont ceux de la souveraineté des peuples.
Un réel réseau de soutien doit être un service public et doit s’accompagner de la création d'un observatoire public des dispositifs d'accueil. L’accès aux droits communs de toutes et tous est une nécessité : droits sociaux, droit du travail, égalité des salaires, participation aux élections nationale et européennes.
Ensemble! Bretagne. Novembre 2015.
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